Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article CONSILIUM PRINCIPIS

CONSILIUM PRINCIPIS

CONSILIUM PRINCIPIS. A côté du Sénat, qui était moins le consilium principis qu'une assemblée représentative, investie d'une portion de la souveraineté sous le premier empire, le prince eut deux sortes de conseils. 1. Le premier, qui forma un conseil privé, constitue en quelque sorte une commission du Sénat, organisée par Auguste, en 727 de R. ou 27 av. J.-C.', pour préparer à l'avance les projets à présenter au Sénat. Cette commission comprenait, outre les consuls, un membre par collège des autres magistratures, et quinze sénateurs tirés au sort et siégeant pendant six mois. Plus tard en 766 de Rome ou 13 de J.-C., et sous prétexte de dispenser cet empereur, à raison de son âge, de se rendre à la curie, on admit la formation d'une commission permanente ou de sénat restreint, composé du fils et corégent de l'empereur, de ses deux petits-fils pubères, des consuls en fonctions ou désignés, et de vingt sénateurs choisis pour un an probablement par le sort, et des autres membres que le prince voulait leur adjoindre pour délibérer, chez lui et sous sa présidence, au nom du Sénat entier 2. Tibère, à son avènement, organisa un conseil privé permanent formé de ses amis personnels (veteres amicos ac familiares) et de vingt des principaux personnages de la cité, pour les consulter sur les affaires publiques, velut consiliarios in negotiis publicis 3, parmi lesquels, à côté des sénateurs, siégeait au moins un chevalier, le fameux Séjan. Mais ce comité cessa de fonctionner pendant l'absence de Rome de Tibère. On voit reparaître le conseil, ruais non d'une manière permanente sous Claude et ses successeurs '. On attribue à Alexandre Sévère la création d'un semblable conseil d'État 5. Mais on peut dire qu'il n'y eut là qu'une série de mesures de circonstance, plutôt qu'une organisation durable d'un comité du Sénat. Les conseillers portaient le titre de consiliarii Augusti' et ne doivent pas se confondre avec les amici ou comites Augusti [AMICT, CoMES], bien que ceux-ci fussent admis à faire partie des conseillers. II. Distinguons de l'institution précédente le conseil de l'empereur ou ses assesseurs en matière judiciaire'. Il eut, comme tous les magistrats, des conseillers appelés à l'éclairer dans l'exercice de sa juridiction privée ou répressive. En outre le prince réunissait parfois des conseil lers intimes pour délibérer soit sur les questions militaires s, soit sur des affaires politiques 9. Mais le plus souvent sous ce point de vue c'étaient des affranchis ou des amis, et même des particuliers sans mission légale qui exerçaient une influence prépondérante, quoique non officielle, comme Mécène sous Auguste, C. Sallustius Crispus sous Auguste et Tibère10, et Vescularius Flaccus sous Tibère"; T. Mommsen fait observer avec raison que ces faits sont du domaine de l'histoire plutôt que du droit public. Mais dans l'exercice de la juridiction, comme l'a montré M. Cuq, le consilium principis devient au contraire, sous Hadrien, un véritable conseil de justice ou d'État au contentieux'2, et qui, pendant de longues absences du prince, dut exercer aussi une influence notable sur l'ensemble des affaires. Quoi qu'il en soit, le conseil, organisé d'une manière stable, était composé de jurisconsultes choisis par le prince et approuvés par le Sénat, de sénateurs, de comites Augusti, et des consuls et des préteurs i3, présidés par l'empereur ou par son délégué'`. Ces membres du conseil, consiliarii Augusti" , étaient nommés par l'empereur parmi les sénateurs 16 et les chevaliers 17 et particulièrement parmi les juristes (prudentes, jurisperiti 18); et tous ceux de l'ordre équestre recevaient un traitement pour assister l'empereur dans l'exercice de sa juridiction qui embrassait le contentieux en matière administrative, civile ou même criminelle20. L'empereur parait avoir désigné ceux des conseillers qui siégeraient à chaque affaire, et il les convoquait spécialement à cet effet'. C'est lui qui présidait, en général, et posait les questions 32 ; mais les préfets du prétoire le remplaçaient souvent dès la fin du second siècle de notre ère". On appelait auditorium principis la salle où il tenait ses séances, et quelquefois le conseil lui-mème, surtout en matière civile. Les consiliarii fournissaient une réponse motivée, par écrit ordinairement2k, mais, conformément au principe général en matière de consilium, l'empereur seul décidait 25. L'organisation établie par Hadrien subsista sous ses successeurs avec quelques modifications26. C'est ainsi que, depuis Marc-Aurèle, les praefecti urbi et praetorio prirent part aux délibérations du conseil d'État 27, spécialement lorsqu'il s'agissait de décisions ayant une valeur législative, comme de la préparation d'un rescrit, jura dictare. Septime Sévère, d'après M. Cuq, en fit un conseil de gouvernement, choisi en dehors du Sénat et formé de conseillers en service ordinaire, soit consiliarii ou simplement adsumpti in consilium, soit appelés seulement en service extraordinaire, à raison de leurs fonctions, comme les préfets du prétoire et de la ville 28. CON 14453 CON Suivant la conjecture de Becker 29, ce serait à partir du règne de Commode que le préfet du prétoire aurait obtenu avec la présidence du conseil, vice sacra 30, la juridiction étendue attachée à cette dignité, comme le constatent les textes qui parlent de l'auditorium praefecti pretorio 31. Les séances du conseil se tenaient soit au palais, soit au forum, soit dans un édifice public 32 ; mais le conseil n'ayant pas de chancellerie spéciale, les écritures étaient d'abord tenues et les rapports préparés par les affranchis de l'empereur n, qui formaient une sorte de cabinet du prince. Mais depuis Habrien, la chancellerie impériale fut officiellement organisée en bureaux 34 (officia, scrinia, ab epistolis, a libellis, a memoria, a rationibus) sous des chefs pris parmi les chevaliers 35, magistri officiorum ou principes et pourvus d'un rang élevé 36; ils assistaient aux délibérations37 en règle générale. Alexandre Sévère donna au conseil d'État une forme encore plus élevée en y appelant vingt jurisconsultes et cinquante avocats au moinsie. Sous Dioclé tien, le conseil devient le CONSISTORIUM PRINCIPIS. G. HUMBERT.